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Les arts martiaux et les femmes
De la guerre des sexes à la solidarité (harmonie !) sur un tapis
mercredi 12 janvier 2022
Par Joël Barillet
Il y a un ou deux millions d’années, se formait le devenir du comportement humain. Deux possibilités : fuir ou combattre. Depuis deux millions d’années l’homme fonctionne toujours pareil.
Art martial signifie "art de la guerre" ; cela commence mal, car à part quelques exceptions, ce sont surtout les hommes qui font ou qui ont fait la guerre. Maintenant parlons Budo : cela peut s’interpréter par "laisser passer la lance, la voie de la paix". C’est déjà plus près de l’énergie féminine, non ?
Les arts martiaux ne sont accessibles aux femmes que depuis très peu de temps. L’arrivée du Budo en occident a permis à la gente féminine de s’intégrer (si j’ose dire !), dans différentes disciplines. L’Aïkido s’est présenté comme un art martial spécifiquement ouvert aux femmes : travail avec la force du partenaire (et non pas adversaire), renvoi de la force vers l’attaquant, travail de contrôle de soi.
Attirées sans doute par son caractère non violent, nombre de femmes sont attirées par cette discipline, beaucoup sont aussi déçues par ce qu’elles y trouvent ou se font une raison.
Les arts martiaux ont été inventés par des hommes pour des hommes, d’où la difficulté pour certains enseignants qui ne se posent pas, forcément, la question de transmettre leurs disciplines avec la spécificité du physique féminin : bassin, poitrine, condition physique (la condition de leur physique !).
Objectivement, la femme a un avantage dès le départ pour la pratique des arts martiaux : le manque de force musculaire, ce qui l’oblige très rapidement à utiliser son corps en entier.
Évidemment, il y a beaucoup de choses à mettre en place pour arriver à ressentir son propre corps.
Dans notre société, la femme pense, ou croit, qu’elle doit faire sa place, ce qui l’amène à une position, opposition, mentale envers les hommes. Dès que la femme est elle-même, elle prend une place, qui n’est pas obligatoirement la place de l’homme, mais une place dans la société, qui lui correspond, qui lui permet de respirer, de prendre son espace, qui pour moi, est un espace complémentaire, qui s’imbrique avec l’espace de l’homme.
Que demande-t-on (que demande l’homme !) à la femme dans les arts martiaux (ou dans la société !) ? De pouvoir copier l’homme, de pratiquer comme un homme, ou, au pire, d’avoir la position que l’on donne à la Femme (je vous laisse deviner !).
Combien de fois j’ai vu, lors de stages, l’intervenant présenter la journée spéciale femme, ce qui voulait dire : "je prends les filles en tant que Uke", sous-entendu : "juste ce jour là car c’est quand même les hommes les meilleurs !!". La femme est-elle si mauvaise que ça pour lui consacrer sa journée ? N’a-t-elle pas les qualités requises pour être la partenaire du "maître" ? Ou n’est-elle là que pour valoriser l’Ego de l’homme ?
L’Ego de la femme et de l’homme est-il placé au même endroit (peut-être un prochain article !) ? Être le meilleur, le plus fort, faire le beau "pour plaire à la femelle".
L’homme est un guerrier qui doit se battre contre les prédateurs (les hommes), qui doit ramener le repas (chasseur), qui doit assurer la protection du clan. Où est la femme, culturellement ? Que fait-elle à part mettre des enfants au monde (et les élever !) ?
Développer l’efficacité de la technique pour prouver sa qualité d’homme ; c’est dur dur d’Être un Homme ! Et c’est plus facile d’Être une femme ?
L’être doit pouvoir dépasser tout ça, pour atteindre et comprendre l’Aïkido dans sa totalité avec sincérité.
Un autre élément qui me semble essentiel dans la formation et la pratique de la femme est l’arrivée d’un 1er enfant.
« Je pratiquais l’Aïkido depuis 7 ans et la chute ne me causait plus trop de problème, mais après avoir accouché de mon 1erenfant, je ne sentais plus la chute de la même manière. Pourquoi ? Évidemment mon corps n’était plus comme avant, mais malgré le retour de mon poids de forme, j’avais une appréhension à chaque chute, une retenue. Mon corps ne fonctionnait pas (plus) comme avant. Mais était-ce mon corps ou mon mental qui bloquait ? » - Une pratiquante
(Pour protéger mon enfant, je dois me protéger…)
Culturellement, au Japon, la position de la femme dans la société
« Derrière la réussite technologique et commerciale du Japon se cache une rigidité effrayante. C’est à travers la place qu’ils occupent dans la société que la plupart des Japonais ont la sensation d’exister. Ainsi, pour des millions d’hommes, la carrière professionnelle est une question d’honneur. Pour des millions de femmes, cantonnées dans leur rôle de mère "éducatrice", c’est à travers les résultats scolaires de leurs enfants qu’elles vivent. Le fossé qui s’est creusé entre les mondes masculin et féminin est considérable. »
C’est donc à l’égalité qu’il faut travailler. Bien longue est encore la route vers ce respect réciproque des partenaires où hommes et femmes acceptent, dans leur diversité, l’équivalence de l’autre.
L’émancipation de la femme ne peut se faire sans l’émancipation de l’homme. Il est donc nécessaire de combattre les stéréotypes et d’influencer les mentalités afin que les hommes et les femmes acceptent dans un esprit de respect réciproque l’équivalence de l’autre.
La femme doit s’imposer non pas par un aspect extérieur recherché mais par sa compétence, et par son intelligence.
Entre fuir et se battre un équilibre doit être trouvé, et grâce à l’Aïkido cet équilibre peut se trouver et se développer. Dans cette discipline nous devons acquérir cette richesse
Pour terminer, les femmes doivent-elles pratiquer l’Aïkido autrement ?
J’ai participé le samedi 7 mars au stage national féminine à Coulaines (72) prox. Le Mans
Dirigé par Tamura shihan, CTN et Takamizo shihan, instructrice à l’Aïkikaï de Tokyo.
Certainement du à la présence féminine en nombre, l’ambiance du stage était décontracté et quand même concentré.
Un vrai régal pour travailler, sans tomber sur un "partenaire" qui cherche systématiquement l’opposition pour prouver sa supériorité.
Donc merci mesdames, Tamura shihan et merci Takamizo shihan.
Joël Barillet
Texte envoyé à la fédération d’Aïkido, responsable féminine, sans retour de sa part, dommage !
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